... en route pour le bouclier.
A Mayotte, il y a le foot. On en a déjà parlé, et en cette période de future coupe du monde, on n'a pas fini d'en parler.
Alors pour changer, on va évoquer un sport cher à mon coeur, qui séduit de plus en plus les jeunes comme les moins jeunes habitants de Mayotte ; le rugby !
L'histoire du rugby à Mayotte ne date pas de hier. Les premiers joueurs étaient surtout des expatriés nostalgiques qui se retrouvaient entre eux pour échanger quelques passes. Ensuite, le début des années 90 a vu la naissance du comité territorial de rugby, situé à Mamoudzou.
Depuis, chaque saison, les différentes formations de l'île se disputent le célèbre bouclier de l'Hippocampe, qui n'est pas sans rappeler le non moins célèbre bouclier de Brennus.
Le titre de champion de Mayotte revient cette année au RCPT (Rugby Club de Petite Terre), qui affrontait en finale le RCM (Rugby Club de Mamoudzou), maintes fois champion de l'île.
Et pour mieux parler de l'ovalie mahoraise, quoi de mieux que de la tester directement ?
Je me suis donc inscrit dans un club, pas trop loin d'Iloni, histoire de m'amuser et de me défouler un peu. Et bien, ma première impression a été celle d'un gamin devant une balle. Quel bonheur de retrouver les sensations d'un ballon quelqu'il soit, de pouvoir taper dedans, et l'attraper à pleines mains ! Bref, je me suis amusé, et je m'amuse encore comme un petit fou qui aurait retrouvé ses 10 ans. Si tu m'crois pas, t'ar ta gueule à la récré !
En parlant de ça, des coups, on en prend un peu quand-même (sinon tout le comique de la situation disparaît), surtout lorsque l'on court comme un chien fou derrière ce référentiel bondissant à trajectoire aléatoire, et
que l'on ne prend pas le temps de vérifier si un affectueux camarade de jeu de cent et quelques kilos ne vous fonce pas dessus, toute puissance testostéronique déployée. Et encore, c'est juste à
l'entraînement. J'attends de voir en match, si je tiens jusque là, et peut-être qu'alors je clamerai haut et fort : "si j'aurais su j'aurai pas venu ! "
Pour me préparer mentalement et physiquement, j'ai engagé sans qu'il le sache un coach personnel, à qui je téléphone souvent : mon neveu Iloé, futur célèbre demi de mêlée du Stade Toulousain qui, pour le coup, a récupéré les gènes de Papou, autre célèbre numéro neuf du RVC (Rugby Club de Vaure).
Ainsi, grâce à ses précieux conseils, j'ai appris à taper un drop et une pénalité, je sais faire une passe presque vrillée, et les dents qu'il me reste sont protégées grâce au protège-dents dédicacé qu'il m'a envoyé. Pour les cotes flottantes, dont une d'ailleurs a été touchée et coulée il y a quelques semaines, je pense acquérir bientôt un costume de sumo gonflable. Il sera, je pense, aussi efficace contre les plaquages intempestifs et autres bourre-pifs non intentionnels, bien-sûr.
Je ne suis pas douillet, mais quelques sages précautions valent mieux qu'une petite cuillère en guise de moyen
de locomotion. Un plaquage en saison sèche sur un terrain de Mayotte équivaut à une belle gamelle en scooter sur le bitume, après on a les nerfs à vifs, et ce n'est pas rien de le
dire.
Mais je me régale et compte bien prendre ma licence pour l'année prochaine. Au pire je garderai le banc de touche, et comme le dit Iloé, j'apporterai les citrons.
En écrivant ces quelques lignes, j'ai une pensée émue pour deux autres grands joueurs après "Iloé
l'anguille" et "Papou noun dé diou ", je veux bien-sûr parler de "Juju la castagne" (qui est aussi mon scuba diving instructor and mentor) qui
laboure les terrains du côté de Latrape, et de "Eric la mandale" dit aussi "el Pestrum" (aussi grand judoka) qui sévissait il y a quelques
années déjà sur d'obscurs stades parisiens, et qui profite actuellement d'une troisième mi-temps bien méritée dans son petit village de Villemeux.
A tous ces grands joueurs je dis : "Souvenez-vous de mon visage, car il n'est pas certain que vous le reconnaissiez lorsque nous nous retrouverons."
Le virus du rugby a planté ses banderilles dans ma tête, j'ai bien peur d'y laisser quelques oreilles, arcades,
ou autres parties partiellement exposées.
Mais promis, je vous ramènerai le bouclier de Mayotte ou, à défaut, un banc de touche.
D'ici là, la vie est belle et c'est tant mieux ! (Jean-Jacques
Vanier)